« L’île » et « Malevil » de Robert Merle (par Ariane)

Aujourd’hui, j’ai le plaisir de prêter mon blog à ma fille Ariane, pour qu’elle vous parle de deux pavés lus cet été dans le cadre du Challenge Pavé de l’été.

Il n’est pas rare de lire des romans qui se font écho. Ce phénomène est d’autant plus courant lorsqu’il s’agit d’ouvrages écrits par un même auteur : nombreux sont les écrivains qui ont des thématiques récurrentes, voire des obsessions qui parcourent leur œuvre.
Néanmoins, pour ma part, il est assez rare que je lise, à la suite, deux romans d’un même auteur qui se fassent écho avec force, sans toutefois être semblables. C’est donc avec bonheur que je n’ai eu de cesse, au cours de ma lecture, d’observer la résonance manifeste qui existe entre les deux chefs d’œuvre que sont L’île et Malevil.

Publiés à dix ans d’écart – L’île, le premier, est paru en 1962, et Malevil en 1972 – ces deux romans font partie d’un genre nommé « robinsonnade ». Ce nom, assez explicite, désigne les récits dans lesquels les héros sont confrontés à la nécessité de rebâtir entièrement la civilisation, qui, pour une raison quelconque, n’existe pas ou plus.
Dans L’île, deux groupes, constitués d’une part de marins britanniques ayant déclenché une mutinerie et, d’autre part, de Tahitiens, doivent imaginer ensemble une nouvelle société sur une île déserte. Après avoir navigué dans le même navire durant plusieurs semaines, ils prennent donc possession d’une terre vierge et entament une vie en communauté, dont il faut définir les règles. C’est autour de la question de « l’attribution » des femmes – présentes en minorité – que se cristalliseront les tensions, annonçant le début d’une lutte sans pitié entre les deux camps.
L’histoire de Malevil est également l’histoire d’une reconstruction : à la suite de ce qui est présenté comme une attaque à l’arme nucléaire, la France est dévastée. Dans le château de Malevil, quelques individus ont échappé à la catastrophe. Agriculture, élevage, mais également organisation militaire : le groupe d’amis doit réinventer entièrement leurs nouveaux modes de vie. Et surtout, tous devront lutter pour protéger leur nouvelle demeure, car ils ne sont pas le seul groupe de survivants des environs…

Les deux romans décortiquent comment se construit peu à peu une civilisation, à travers une succession de décisions pratiques, politiques et éthiques de la part des protagonistes.
Outre une certaine similarité des récits – le schéma de base des deux romans s’articule autour d’êtres isolés devant se battre pour survivre – L’île et Malevil sont des romans portés par des héros qui partagent des valeurs communes. Qu’il s’agisse de Purcell (L’île) ou d’Emmanuel (Malevil), les deux hommes défendent des idéaux de fraternité, de solidarité et d’empathie. Ils sont, en quelque sorte, la représentation de ce que pourrait être une utopie de vie communautaire, où la discussion, l’ouverture et le respect mutuel seraient la base des relations humaines. Si ces idéaux se voient contredits à de nombreuses reprises dans chacun des romans, il n’empêche qu’ils imprègnent à la fois les actes de ces héros et, bien sûr, le message que souhaite nous transmettre l’auteur.
Car L’île et Malevil ne sont pas uniquement d’excellents romans d’aventure – ce qu’ils sont incontestablement : des obstacles se dressent sans cesse sur la route des personnages, les rebondissements sont nombreux et le suspense est parfaitement maîtrisé – ils sont aussi des textes d’une grande sensibilité, qui creusent la psychologie humaine sous toutes ses facettes.

À l’heure des grands questionnements écologiques, des remises en question profondes de nos modes de vie et du rapport que nous entretenons à la fois aux autres êtres humains et à notre propre environnement, L’île et Malevil sont des fables politiques d’une incontestable actualité dont je ne peux que recommander la lecture.                                                                             ARIANE

« L’île« , Robert MERLE (1962)
Editions Folio (698 p)
« Malevil« , Robert MERLE (1972)
Editions Folio (636 p)

13 commentaires sur “« L’île » et « Malevil » de Robert Merle (par Ariane)

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  1. Même si « connus », je ne les ai jamais lus. Et j’avoue que ta chronique, Ariane, me donne vraiment envie de les découvrir. Je ne lis pas beaucoup de « littérature » pour le moment (plutôt SFFF, polar/thriller), et mon dernier en date (Bienvenue au club de Joanthan Coe) me rappelle qu’il y a quand même des trucs bien sympas à lire…
    Je trouve aussi la nouvelle maquette des folio très aguichante (c’est le fluo ça! 😉 hihi)

    Je note pour ces deux livres!

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  2. J’ai lu « Malevil » qui m’avait fortement impressionnée à l’époque ; je ne connais pas l’île, ce serait une bonne idée de relire Robert Merle dont on ne parle plus beaucoup.

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  3. Très belle chronique… Je n’ai lu que Malevil moi aussi, lors d’une période adolescente « Robert Merle » (j’ai adoré La mort est mon métier, ou Un animal doué de raison, entre autres). Je note L’île, qui devrait me plaire.

    Aimé par 1 personne

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