La Troisième Révolution Industrielle dans le Nord – Pas de Calais : c’est parti !

Jeremy Rifkin, vous connaissez ?
Avant de l’écouter vendredi dernier, dans le cadre du World Forum de Lille, c’est dans le numéro 1 de « We demain » que je l’avais découvert en même temps que cette fameuse Troisième Révolution Industrielle qu’il préconise.

  • La Troisième Révolution Industrielle
les trois révolutions
source : Master plan

Jeremy Rifkin part du constat que notre civilisation basée sur l’utilisation de l’énergie fossile est condamnée et que le changement climatique qu’elle a induit menace l’ensemble des écosystèmes. Pour lui « il devient de plus en plus clair qu’il nous faut une nouvelle logique économique, capable de nous faire entrer dans un futur équitable et plus durable » (toutes les citations sont extraites de son ouvrage, « La troisième révolution industrielle », paru en 2012 aux éditions Les Liens qui Libèrent). Les recherches qu’il a menées pendant plus de trente ans l’ont conduit à « comprendre que les grandes révolutions économiques de l’histoire se produisent quand de nouvelles technologies des communications convergent avec de nouveaux systèmes d’énergie. » Dans les années 1990, il constate « qu’une nouvelle convergence des communications et de l’énergie était en gestation. La technologie d’internet et les énergies renouvelables étaient en voie de fusionner pour créer une puissante infrastructure nouvelle, celle d’une troisième révolution industrielle (TRI) qui allait changer le monde ». Les énergies seraient produites et distribuées de plus en plus localement, avec comme corollaire une organisation des sociétés bien plus latérale que verticale.
Pour être effective, cette Troisième révolution industrielle s’appuiera sur 5 piliers, « qui doivent être mis en place simultanément, faute de quoi les fondations ne tiendront pas ». Il s’agit de :
« (1) le passage aux énergies renouvelables ; (2) la transformation du parc immobilier de tous les continents en ensemble de microcentrales énergétiques qui collectent sur site des énergies renouvelables DSCN0710rd; (3) le déploiement de la technologie de l’hydrogène et d’autres techniques de stockage dans chaque immeuble et dans l’ensemble de l’infrastructure, pour stocker les énergies intermittentes ; (4) l’utilisation de la technologie d’internet pour transformer le réseau électrique de tous les continents en inter-réseau de partage de l’énergie fonctionnant exactement comme internet […] ; et (5) le changement de moyens de transport par passage aux véhicules électriques branchables ou à pile à combustible, capables d’acheter et de vendre de l’électricité sur un réseau électrique interactif continental intelligent. »

Jeremy Rifkin, économiste, offre une réflexion et une vision prospectives plus que bienvenues, au moment où notre futur ne cesse de nous inquiéter tant il est devenu impossible de s’y projeter: il bâtit en effet un projet à mettre en œuvre, économiquement mais pas seulement, pour changer le monde où nous vivons et en assurer, d’un point de vue environnemental, la durabilité. L’Union européenne et de nombreux pays ont déjà fait appel à lui pour les conseiller dans les réformes qu’ils veulent mener.

  • Le World Forum de Lille, du 23 au 25 octobre 2013

La région Nord – Pas de Calais qui, historiquement, a autant bénéficié de l’essor de la première révolution industrielle qu’elle a pâti de son déclin, a décidé de prendre à bras le corps cette Troisième Révolution Industrielle pour se construire un avenir. Dans cette optique, elle a travaillé de concert avec Jeremy Rifkin afin d’établir le Master plan qui a été présenté vendredi 25 octobre au cours de la conférence de clôture du World Forum de Lille.

Séance d’ouverture :

Ellen MacArthur et Ervin Laszlo

Le World Forum, dont c’était la 7ème session, s’était ouvert mercredi matin avec de belles rencontres, sous l’égide de son président, Philippe Vasseur (qui est aussi président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Région Nord de France). Après son intervention, c’est Ervin Laszlo, musicien et philosophe, fondateur du Club de Budapest, qui a pris la parole. Il a rappelé que nous devons d’abord faire évoluer nos consciences, nos valeurs, nous situer dans le monde et reconnaître que nous nous trouvons à une bifurcation, suite à des crises qui vont s’intensifiant. Nous devons créer un monde coopérant, changer ensemble, en suivant ceux qui ont une vision planétaire des choses. Il a conclu en évoquant la nécessité, à partir de notre changement personnel, d’organiser une contagion positive et rapide (c’est dans cette optique de contamination positive que j’ai rédigé cet article).
Après lui, ce fut au tour d’Ellen MacArthur, l’ex navigatrice solitaire qui, depuis maintenant quelques années, travaille grâce à sa Fondation à la mise en œuvre de l’économie circulaire, de s’exprimer, en évoquant de manière concrète et convaincante les actions qu’elle a initiées et qui, toutes, visent le long terme. Elle a été suivie par le dynamique Lyonpo Norbu Wangchuk, Ministre des Affaires Economiques du Bhoutan, petit pays qui essaie, à son niveau, de viser le bonheur pour ses habitants. Trois entrepreneurs lui ont succédé, pour témoigner de leurs bonnes pratiques. Ils font partie de tous ceux qui ont rejoint la GUS, Global Union for Sustainability, « union d’entreprises, d’organisations et d’individus qui s’engagent publiquement à mener des actions simples, concrètes, mesurables avec leurs indicateurs, pour faire progresser les thèmes du développement durable. »

Une fois cette session du World Forum dûment ouverte, celui-ci s’est déroulé sur 3 jours. S’y sont enchaînés des rencontres et ateliers thématiques de tous formats, mêlant experts internationaux, acteurs de la vie économique et étudiants dans un bouillonnement d’énergie, d’idées et d’échanges, avec des réalisations effectives pour illustrer des processus déjà en marche et des pistes ouvertes vers des solutions nouvelles.

Séance de clôture :

Jeremy Rifkin 2
crédit photo : François Lo Presti. AFP

Et, le vendredi après-midi, c’est vers Jeremy Rifkin himself que tout a convergé, dans un auditorium plein comme un œuf. Il est annoncé par le très charismatique Daniel Percheron (pas un gamin, mais bon sang, quel punch !), président du Conseil Régional du Nord – Pas de Calais, évoquant « notre prophète, Jérémy Rifkin, un des rares hommes aujourd’hui qui parle à la planète » et soulignant qu’entre lui et la région, c’était « une rencontre qui avait une chance sur 1000 de se produire ».
Dans la foulée, Jeremy Rifkin vient présenter le Master plan adopté, en le resituant dans son contexte et son horizon global. Il conclut avec une passion communicative que « c’est facile de faire un plan, mais c’est une énorme responsabilité ». Nous ne pouvons pas nous décevoir nous-mêmes ; des gens viendront et prendront modèle, il y aura cet héritage à transmettre.
Enfin, Philippe Vasseur expose les grandes lignes du Master plan (vous les retrouverez ici), déclinaison sous forme d’objectifs des 5 piliers conçus par Jeremy Rifkin, appliqués en grandeur réelle à la région Nord – Pas de Calais. Il rappelle en préambule que les Français sont par nature sceptiques, pessimistes et râleurs … ce qui n’a pas empêché la mobilisation autour de ce projet, au sein duquel un certain nombre d’actions sont d’ores et déjà en cours. Sur la question du financement, il précise que, en dehors des financements institutionnels, il incombe au secteur bancaire de s’impliquer. Il ajoute que l’épargne privée pourra aussi être drainée via une plateforme de crowfunding vers laquelle elle sera orientée. Philippe Vasseur pointe par ailleurs la nécessité d’accorder « le droit à l’expérimentation » pour promouvoir les initiatives et l’innovation, en apprenant à travailler de manière latérale alors que nous avons l’habitude de la centralisation. Il souligne que l’application des mesures prévues inscrira non seulement l’économie de la région dans une perspective durable, mais constituera un énorme gisement d’emplois. « Ce que nous avons fait depuis un an », conclut-il, « ce que nous faisons aujourd’hui, c’est un petit miracle ». La Troisième Révolution Industrielle en Nord – Pas de Calais, c’est un « espoir fantastique » : « un autre monde est possible ! ».

C’est cet espoir enthousiasmant que je voulais partager avec vous, en vous rapportant ces quelques moments dont je me dis qu’ils pourraient bien, dans le futur, être qualifiés d’historiques.
Le Nord – Pas de Calais vient de s’engager on ne peut plus concrètement dans la Troisième Révolution Industrielle et on lui souhaite des tas d’imitateurs, dans notre intérêt à tous !

slogan

D’autres échos dans les articles publiés par Le Monde, Libération, La Croix

7 commentaires sur “La Troisième Révolution Industrielle dans le Nord – Pas de Calais : c’est parti !

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  1. Je le connais depuis plusieurs années (merci France-Culture) c’est un monsieur absolument passionnant ; il devait y avoir de la matière grise en ébullition pendants ces journées et ça fait un bien fou. Pendant que les medias nous serinent toujours les mêmes schémas en boucle, d’autres réfléchissent et s’activent dans la discrétion. J’aimerais bien voir la même chose dans ma région.

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    1. Ce n’est pas facile de présenter la Troisième Révolution Industrielle en essayant de ne pas faire trop long, mais cela me paraissait important d’en parler, car plus l’idée se répand, plus les réalisations correspondantes ont de chances de voir le jour.
      Merci pour ton commentaire, en tout cas 🙂 .

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