« Les Douze d’Aritsar », Jordan IFUEKO

Quatrième de couverture :
Elle était née pour le tuer… elle a promis de le protéger.
L’empereur d’Aritsar gouverne avec 11 conseillers, tous reliés entre eux par le pouvoir du Rayon. Grâce au Rayon, ils sont unis comme des âmes sœurs, et personne ne peut tuer l’empereur – à part un de ses conseillers.
La jeune Tarisaï a grandi dans un palais isolé, loin de la capitale, élevée par une mère mystérieuse. À onze ans, elle est envoyée à la sélection des conseillers du jeune prince Dayo. Au moment de partir, sa mère l’oblige par un vœu magique à une mission toute autre : elle devra gagner l’amitié de Dayo… puis le tuer.
Tarisaï ne veut pas attendre que la malédiction de sa mère s’accomplisse, elle ne veut être l’instrument de personne.
Mais voilà qu’à seize ans, le temps lui est compté ; son lien avec le prince est plus solide que jamais. Sera-t-elle assez forte pour suivre son propre chemin ?

Je me suis laissée séduire par la proposition qui m’a été faite de lire ce roman pour adolescents en avant-première car la thématique de fond me plaisait et je ne l’ai pas regretté. Cela faisait quelque temps que je n’avais pas fait d’incursion du côté de la littérature jeunesse et ce livre m’a rappelé à quel point elle peut être de qualité : c’est tout-à-fait le genre de roman dont j’aurais pris plaisir à partager la lecture avec mes filles quand elles étaient plus jeunes.

Coup de chapeau, tout d’abord, pour la construction d’un monde dépaysant, où la magie tient une place importante. On le constate dès le début du roman, en découvrant que la demeure où réside la petite Tarisaï ne peut pas être vue de l’extérieur, alors même que l’enfant voit ce qui se déroule autour d’elle. On ne tarde pas non plus à apprendre que Tarisaï, fille de la mystérieuse Dame, l’est aussi du non moins énigmatique ehru, sorte de djinn dont la Dame a bridé les pouvoirs. Et en matière de pouvoir, Tarisaï dispose de celui de voler les souvenirs des choses et des gens lorsqu’elle les touche, « Bienfait » (pour reprendre le terme utilisé ensuite dans le cadre de la sélection des onze entourant l’empereur en place ou à venir) s’avérant lourd à porter.
L’existence des douze, auxquels se réfère le titre, correspond à l’histoire de l’univers dépeint, dont les douze parties ont été réassemblées par un pouvoir issu de la nature. Ces pays évoquent ceux du continent africain, par leur géographie, leur culture et le physique de leur population. Hors empire, le pays de Song rappelle l’Asie.

Tarisaï est une petite fille (onze ans au début du livre) isolée et le fait de rejoindre un groupe de jeunes enfants sélectionnés comme elle pour être les compagnons de Dayo lui permet d’accéder à une forme de famille, dont elle a été privée jusque-là : sa mère, très souvent absente, ne l’a en effet pas du tout entourée de l’affection que l’enfant recherchait en vain.
Ce premier tome s’apparente à un roman d’apprentissage sur fond de roman d’aventure, car en voulant échapper à la malédiction que sa mère a proférée à son encontre, Tarisaï se jettera dans un maelstrom de péripéties qui l’emportera bien loin de son environnement familier. Sur cette toile chamarrée, ce sont non seulement des destins individuels, ceux de Tarisaï et de Dayo, qui vont se jouer, mais ceux d’un peuple ou plutôt de douze peuples.
Le roman s’intéresse de près à l’évolution de son héroïne, d’enfant à jeune fille : elle devra trouver « sa raison d’être », pour dépasser sa vocation initiale à n’être que l’extension/outil de sa mère (celle-ci ne l’appelle que « Faite de moi »). Mais il vise aussi, plus largement, la question politique au sens du bon gouvernement de la cité. Tarisaï se rend ainsi compte que la justice est vue comme le maintien de l’ordre et non pas comme un symbole d’équité. Elle constate par ailleurs que l’unicité de l’empire prônée par l’empereur, pour pacifier ses peuples, dissimule un dessein plus opaque : ce sont les spécificités de ces peuples (linguistiques, culturelles) qui seront en effet abolies (on pense aux peuples colonisés ou à la manière dont sont traités les groupes de populations en infériorité numérique dans une nation) car « Pourquoi être uniques quand on peut tous être identiques ? ».

Sans manichéisme, ce roman original, pour adolescents mais pas que, efficace et bien construit, irrigué de valeurs humaines, pose intelligemment de bonnes questions, relatives à l’acceptation ou au refus de tout ce qui peut s’apparenter au déterminisme, individuel ou social.
Suite et fin dans le tome 2, à paraître en août 2023, mais il y a une pause dans le récit, donc ce premier tome peut déjà se lire sans attendre.

« Les Douze d’Aritsar – tome 1 : La vengeance de la Dame », Jordan IFUEKO
titre original Raybearer (2020)
traduit de l’anglais (États-Unis) par Anne Delcourt
éditions Nathan (455 p)
en librairie ce 5 janvier 2023

4 commentaires sur “« Les Douze d’Aritsar », Jordan IFUEKO

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