« 22/11/63 », Stephen KING

22/11/63Le thème en quelques phrases, si vous ne le connaissez pas encore :
Jake Epping, professeur d’anglais vivant aux Etats-Unis en 2011, découvre qu’il a la possibilité de retourner dans le passé, en 1958. S’il y reste assez longtemps, il pourra empêcher l’assassinat du président Kennedy le 22/11/63 et, avec lui, tous les événements qui ont suivi, en particulier la guerre du Vietnam.
Alors, il y va …

Dis comme ça, on se demande comment l’auteur va nous occuper pendant 930 pages (!), en plus on connaît déjà la fin (ben oui, la mission que Jake s’est donnée a dû échouer, puisque JFK est mort !), non, j’rigole, je l’sais que l’auteur fait ce qu’il veut, donc peut-être que chez lui Kennedy vivra ?!
Sauf que ce serait oublier qu’un écrivain est avant tout un conteur et, avec Stephen King, c’est à un conteur de la meilleure espèce qu’on a affaire.
Alors il nous ferre, dès les premières pages, avec cet autoportrait de Jake en prof « qui n’a jamais eu la larme facile » mais qu’une copie d’élève adulte, témoignage terrible, bouleverse, c’est comme cela qu’on se fait avoir, il est fort le King !
Avec lui, les descriptions ne sont pas pesantes, la plongée en 1958, dont je craignais les relents nostalgiques (ah, le bon vieux temps ! l’auteur est né en 1947) est d’une vérité troublante et n’omet rien : les aliments ont une saveur exceptionnelle et la nature, là où elle est préservée, est belle, mais les gens fument comme des sapeurs, les usines polluent à tout va et la ségrégation est une réalité pesante. Malgré tout, Jake s’y plaît, dans ce « Terrain d’Antan », et nous avec (surtout lorsque, comme moi, on est fan des belles voitures américaines de l’époque) : immersion réussie, on y est et on n’a aucun mal à y rester, en compagnie de ce héros qui nous prend à témoin de ce qu’il a vécu, nous le raconte comme si on était ses confidents.

Mais, m’interrogerez-vous (avec cette insatiable curiosité qui vous caractérise) (accompagnée d’un désir non moins insatiable de ne pas en savoir trop, faudrait pas gâcher la lecture !), quid de l’histoire ?
En réalité, vous répondrai-je (avec mon affabilité coutumière), il n’y a pas une mais des histoires (c’est là qu’il est re-fort, le King !) (il y a même une histoire d’amour, mais pas tout de suite).
Je n’irai pas jusqu’à dire que, du coup, on se retrouve comme dans une série avec des saisons qui s’enchaînent, mais c’est un peu ce que j’ai ressenti. Car Jake doit faire face à des échéances successives, en fonction des buts qu’il s’est assignés (le but final déjà évoqué mais aussi des objectifs préalables qui ne lui sont pas forcément liés), si bien que le récit se construit autour d’eux, avec à chaque fois un point d’orgue puis une pause, on respire avant que ça redémarre. J’ai eu un coup de mou dans ma lecture, aux 2/3, sur une cinquantaine de pages où je trouvais que ça piétinait. Mais sinon, j’ai rapidement su que ce pavé allait rejoindre le coin des préférés, puis j’ai commencé à m’inquiéter en me demandant ce que je pourrais lire ensuite qui serait aussi bien (un signe qui ne trompe pas !), bref, c’est le genre de livre (au profit duquel j’ai même délaissé 2 épisodes de « Homeland » saison 2, pour vous dire) dont on veut connaître la fin mais dont on appréhende le moment où on le quittera.

Parce que c’est un sacrément bon bouquin ! Avec pour héros un voyageur temporel, certes, mais pas de quoi affoler les réfractaires à la SF (dès lors qu’ils admettent le fait que, oui, Jake peut retourner en 1958), c’est davantage une toile de fond que le cœur du récit, même si le thème gagne en importance sur la fin. Quant aux amateurs du genre, ils trouveront quelques idées à leur goût à picorer et un traitement de la question du voyage dans le temps tout à fait honorable. Au-delà de ces considérations « catégorielles », ce qui emporte sans conteste l’adhésion du lecteur, ce sont des situations et des personnages (dont certains fort attachants) auxquels on croit, une bonne tension narrative (les quelques petites baisses de régime sont vite oubliées) et une écriture enlevée. L’amour tient sa place dans le récit et se swingue à l’occasion, je n’y ai rien trouvé à redire, bien au contraire.

Pavé qui se lit (quasiment) tout seul « 22/11/63 » est un roman avant tout pétri d’humanité (ce qui meut notre héros est le souci de l’autre), en mode SF-pour-tous avec, cerise sur le gâteau, une fin à la hauteur (et ça, c’était pas gagné !).
Des livres comme lui, j’en redemande !

« 22/11/63 », Stephen KING
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Nadine Gassie
Editions Albin Michel (937 p)
Paru en mars 2013

Les avis, tous positifs, de : Anudar, Clara, Véronique, Val-m-les-livres, Pierre Faverolle, BiblioMan(u), Edea, Efelle, Lhisbei, (dites-moi si je vous ai oublié) …

56 commentaires sur “« 22/11/63 », Stephen KING

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  1. Moi aussi j’en redemande… Tu m’agaces, là, car ce bouquin , emprunté il y a trois semaines par un lecteur, ne revient pas (oui, je me suis inscrite sur la liste…)

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    1. Et moi qui m’étais bien mis la pression, je rends mon bouquin 10 jours après emprunt … et il n’était même pas réservé ! (ceci dit, il a été réemprunté dans la foulée)

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  2. Tu l’as fini avant moi ! Grrr … pour l’instant il me plaît. Je suis rassurée sur la fin car depuis que je lis je veux une fin digne de Stephen King. Pour l’instant je suis emportée par l’histoire.

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    1. J’aurais aimé pouvoir le faire durer, prendre mon temps pour le lire : tu es dans ce cas, donc c’est très bien ! (et tu m’en diras davantage lundi !)

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  3. Je me suis laissé dire que ce pavé serait le prétexte idéal pour renouer avec King que j’ai dévoré des années durant, puis abandonné depuis (PS : commentaire sans aucun arrière-pensée, que cela soit clair ;-D).

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    1. Mais QUELLE(s) ARRIERE(s)-PENSEE(s) ?! (comme si c’était mon genre, à moi 😉 !)
      Ceci dit, oui, ça me paraît une bonne occasion de reprendre contact !

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    1. Justement, à moi qui en redemande et n’ai quasiment jamais lu Stephen King, tu serais de bon conseil.
      Que me recommanderais-tu, dans « la veine non horrifique », pour reprendre tes termes ?
      J’ai déjà lu, il y a longtemps, « Dead Zone », me suis un peu ennuyée dans « Cœurs perdus en Altlantide » (je crois que je ne l’avais pas fini). Et il y a des livres que j’aurais sûrement aimés, si je ne connaissais pas déjà l’histoire via la version ciné (« Carrie », « La ligne verte »).

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    1. Comme je le disais à Véronique, je n’ai quasiment rien lu de lui, en raison des thèmes abordés, que j’ai peut-être un peu rapidement considérés comme relevant toujours du registre de l’horreur.
      En tout cas, je pense que celui-ci te plairait : plus qu’à attendre éventuellement la version poche pour l’été prochain (un beau pavé 😉 ) !

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  4. Je suis entièrement d’accord avec toi, King est un excellent conteur. Je n’ai pas lu 27/11/63 (j’attends sagement sa sortie en poche, histoire que les miennes restent pleines!), mais dans un tout autre registre, Simetierre fait parti des romans que j’envisage de lire pour le challenge.

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  5. J’ai très envie de le découvrir celui-ci. J’hésite même à attendre sa sortie en poche (je risque de craquer avant). Le sujet à la fois fiction et historique m’intéresse vraiment.

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    1. J’ai failli l’acheter, c’est sans doute ce que j’aurais fini par faire si je n’avais pas pu l’emprunter en bibliothèque, donc je te comprends.

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  6. Je n’ai jamais lu King, si, si, c’est possible…! Mais celui là me fait diablement envie ! Sacré pavé tout de même…, peut-être pas celui que je lirai sur la plage cet été mais je note !

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  7. Je pense qu’il n’y a plus beaucoup de place dans ma valise pour un nouveau pavé mais ce que tu en dis est plus que tentant. Je n’ai plus lu King depuis mes… euh… 17 ans (une éternité). J’avais un peu peur d’un xième truc sur Kennedy mais cela semble être bien plus que cela. Et puis si ça empêche de finir « Homland » saison 2, c’est argument massue. 😉

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  8. Bon eh bien c’est confirmé, tu me donnes très envie de lire ce roman, que je mettrai peut-être dans ma valise (en ebook, ce sera moins lourd!). Moi j’aime bien les voyageurs temporels, je suis sensible à ce que tu dis sur la peinture réaliste (et pas idéaliste) de ce passé, et sur le côté un peu série!

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    1. C’est la magie WordPress (mais je pense que c’est possible sur d’autres plateformes) ! On a le choix entre une bannière fixe (ce que je fais de temps en temps, quand tu vois la route avec la voiture américaine etc.) et des bannières aléatoires, qui affichent la série d’images qu’on a rentrées comme en-tête. Ce n’est pas la première fois que je le fais (il y a eu d’autres séries, avant la printanière), mais le visiteur ne le remarque pas toujours. Kathel le fait aussi (et Gwenaëlle/Skriban le faisait sur sa version précédente).

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  9. Lu dans les tout débuts de mon aventure avec King, j’avais adoré Misery (une femme séquestre un écrivain pour qu’il lui ponde la suite d’une série de romans qu’il a décidé d’arrêter … de la violence certes mais sur le mode thriller psychologique) j’avais adoré aussi ( dans le genre lecture au long cours) il n’y a pas si longtemps, Le Fléau (2 gros tomes en poche) une épidémie touche brutalemnt le monde entier et décime la population :http://livresarrajou.blogspot.fr/2011/05/le-fleau-tomes1-et-2-de-stephen-king.html … la petite fille qui aimait Tom Gordon … et tant d’autres, il faudrait que je réfléchisse plus….

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    1. « Misery » fait partie de ceux dont j’ai déjà vu l’adaptation ciné (brrr…). « Le fléau » a l’air très bien, mais c’est un post-apocalyptique et j’ai l’impression d’en avoir trop lu.
      OK, je fais ma difficile ! (et pour « La petite fille… « , hier, je me suis autospoilée en cherchant des titres de King qui pourraient me plaire sur Wiki ! j’ai arrêté parce que si, au lieu d’avoir le thème, j’ai le résumé de l’histoire, ça ne va pas le faire !)

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  10. Très belle chronique ! Je n’ai jamais lu Stephen King et pourtant j’ai vu bien des films adaptés de ses livres (et que j’ai aimé !)… Celui-là je le lirai quand il paraitra en poche et pourtant, le côté gros énorme pavé me fit un peu peur…

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    1. Je comprends ! J’en ai eu aussi (mais je n’ai pas fait de pause car je voulais le rendre à la bibli). J’espère que tu repartiras de plus belle dans ta lecture !

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  11. Tu me donnes très envie de découvrir ce titre Stephen King… Ca fait un bye que je ne me suis pas plongée dans un de ces pavés, et j’en garde un souvenir addictif !

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  12. Je n’ai jamais lu Stephen King, mdu coup ce titre m’intéresse car j’ai toujours été fascinée par l’histoire des Kennedy. Ce serait une bonne manière je pense de découvrir ce monstre de la littérature américaine.

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  13. POur moi ce livre a de grosses lacuunes et des problèmes de fonds (le théorie du tueur isolé est ubuesque). je me permets de citer ton billet sur mon blog pour proposer d’autres avis. Au plaisir de te lire.

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