En 1962, les ouvriers algériens qui ont émigré pour travailler en région parisienne se retrouvent « logés » dans un bidonville près de Nanterre. Et lorsqu’elles les rejoignent, leurs familles découvrent des conditions de vie plus que précaires, auxquelles elles ne s’attendaient pas : une cabane où elles s’entassent, sans eau courante ni électricité…
« Demain, demain » évoque ce bidonville au travers du quotidien de Kader, qui a fait venir auprès de lui sa femme Soraya et leurs deux jeunes enfants, Ali et Samia.
Tous rêvent d’être relogés dans ces HLM à la construction desquels Kader participe. Seul cet espoir les aide à endurer des conditions de vie inacceptables.
J’ai beaucoup apprécié cet album-chronique, dont l’intérêt socio-historique est indéniable. Il m’a permis de découvrir l’existence du bidonville dit de La Folie, dans lequel on se retrouve littéralement transporté, tant est précise la description de la vie sur place. Le graphisme, un trait noir et blanc fouillé, restitue parfaitement les environnements. L’auteur centre son propos sur une famille en particulier, à laquelle le lecteur s’attache immédiatement. Cet ancrage personnel permet de toucher du doigt une réalité au jour le jour intolérable. On perçoit aussi, par l’intermédiaire de ces personnages, à quel point la situation dans laquelle ils se trouvaient paraissait inextricable : les formalités d’accès à un logement décent sont un cauchemar administratif et, de toute façon, le nombre d’appartements disponibles est très largement insuffisant face à l’afflux de demandes.
Un petit regret, cependant, que le contexte ne soit pas davantage explicité (les quelques pages à la fin, combinant photos et textes additionnels, n’ont pas suffi à satisfaire ma curiosité) . Je compare cet album à un autre qui avait lui aussi pour objectif de rappeler à nos mémoires collectives, oublieuses, des événements dont la France n’est pas fière, « Dans l’ombre de Charonne » : le témoignage personnel y était assorti d’interventions de l’historien Benjamin Stora et cela permettait de bien resituer les faits, d’en appréhender tous les tenants et aboutissants. Cet éclairage m’a manqué ici. Enfin, mais c’est un détail, je me suis étonnée de noter en fin d’album que le physique des deux enfants n’avait pas changé alors qu’on venait d’effectuer un bond de quatre années.
Esthétiquement très réussi, « Demain, demain » s’inscrit efficacement dans la lignée de ces albums – témoignages sortant la BD de la seule sphère ludique, pour la faire entrer dans le domaine des documentaires, ouvrant du même coup ceux-ci à un plus large public : quand, en outre, le sujet traité mérite une ample diffusion, on ne peut que s’en réjouir !
« Demain, demain », Laurent MAFFRE
Actes Sud BD / arte éditions
Paru en mars 2012
Repéré chez Mo’ et Choco (un coup de cœur pour toutes les deux).
Lu aussi par Canel (et un nouveau coup de coeur 🙂 !)
Je garde un très bon souvenir de cet album. A la même période, j’avais également lu « Les Mohamed » de Ruillier… je ne sais pas si tu connais ce titre .
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Je suis allée voir le billet que tu as consacré à ce titre : intéressant, sans aucun doute, mais pour ce qui est du graphisme, on est complètement à l’opposé par rapport à l’élégance du trait de Laurent Maffre et j’ai du mal avec ce style (enfin, pour moi, cette absence de style).
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C’est le tout de s’y habituer et au bout de quelques pages, on a déjà oublié qu’il est si atypique.
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Tu es plus mitigée que les autres.
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En cours de lecture (en particulier au milieu, quand Kader va faire sa demande de logement… que je pensais faite depuis longtemps, avant qu’il fasse venir sa famille !), je me suis posée pas mal de questions, je voulais en savoir davantage sur la manière dont ce bidonville avait pu émerger, les consignes données à son sujet aux forces de l’ordre etc. etc. Je trouve la représentation de la vie dans le bidonville excellente, c’est juste que j’aurais voulu que l’album aille un peu plus loin dans sa dimension historique.
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Les Mohamed est aussi dans ma bibli, tiens. Un bon souvenir que ce Demain, demain
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C’est un album que je suis contente d’avoir découvert.
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Je l’ai reçu aussi, dans le même cadre que toi, mais pas encore lu ! Tu lui donnes une bonne note malgré ces quelques remarques.
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Oui, il y a l’album que j’aurais voulu… mais celui que j’ai entre les mains est déjà très bien, le fond et la forme sont de belle qualité !
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Je crois que c’est un des albums qui me fait le plus envie ces derniers temps. J’attends qu’il arrive à la bibliothèque, ça ne devrait plus tarder…
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Heureusement qu’il avait été sélectionné pour Angoulême car il est paru il y a un an (et ta bibliothèque ne l’avait pas acquis à ce moment-là).
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Je ne connais pas mais tu me tentes beaucoup
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C’est un album qui mérite d’être lu et la forme est à la hauteur du fond.
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Voilà qui pourrait me plaire. Je note la référence ! Merci !
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Elle te plaira, je pense, cette chronique sensible et réaliste de la vie dans ce bidonville.
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J’aime beaucoup ces albums reportage, de plus en plus d’ailleurs…
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La BD s’est découvert (et ouvert) de nouveaux territoires et c’est très bien.
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C’est le type d’album qui me plait !
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Plus ça va, plus la BD s’avère à même de répondre aux goûts les plus divers (et ceux qui disent « ne pas aimer la BD » ne mesurent pas, souvent, l’évolution qu’elle a connue, ils en restent à des représentations obsolètes du genre).
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Pour ma part, j’ai encore un peu de mal avec ces BD ambitieuses et très sérieuses, tout comme j’ai du mal aussi avec leur opposé, la BD d’action pure mais je commence doucement à apprécier ces beaux albums type reportages que j’ai lus dernièrement comme ceux de Lepage par exemple . Il y en a de plus en plus , heureusement!
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Mes goûts ne me portent pas non plus naturellement vers ce genre d’albums (ni vers les albums-tranches de vie d’ailleurs).
Tu verras, celui-ci est en plus un bel objet, avec du papier épais, de qualité.
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Je l’avais repéré dans la sélection officielle du dernier festival d’Angoulême… il faudra donc que je franchisse le pas…
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Eh oui ! Y’a plus qu’à 🙂 !
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