« Les trois lumières », Claire KEEGAN

Un matin, on emmène cette petite fille chez un couple qui va la garder, pour une durée indéterminée. On est en Irlande, la petite fille habite à la campagne, dans une ferme, le couple aussi, mais près de la côte. La petite fille a déjà beaucoup de frères et sœurs et sa maman attend un bébé.

Court récit (100 petites pages que j’assimilerais à une nouvelle), « Les trois lumières » (« Foster », en anglais, titre moins poétique mais plus explicite, le terme signifiant placé en famille d’accueil) se lit à hauteur d’enfant, puisque tout y est décrit du point de vue de sa jeune narratrice. En cela résident son charme et son mystère, l’innocence (au sens propre du terme) de la petite fille ne lui rendant pas forcément intelligibles non seulement les situations mais aussi les gens, adultes étranges voire étrangers. La narration emprunte donc le chemin de ce regard étonné mais sans plus : on sent que l’enfant a l’habitude d’obéir et là encore, elle fait ce qu’on lui a demandé, sans se poser beaucoup de questions, on ne lui en laisse pas le loisir. Et c’est justement ce qui surprend le lecteur, cette quasi-passivité, témoignant sans qu’il soit besoin de mots du lien ténu qui unit l’enfant à ses parents.
Ainsi, au fil du récit, continuerons-nous à voir les choses mais en cherchant à voir au-delà, à travers elles, par le biais des indices ou des indications donnés, pour deviner un arrière-plan dont les contours se dessinent plus nettement. Emergent progressivement trois portraits esquissés, ceux de deux adultes et d’une enfant dont les chemins de vie devaient se croiser. Cette vie ne leur a pas toujours fait de cadeaux, elle les a aussi forgés tels qu’ils sont et pour l’enfant, encore en devenir, la rencontre avec deux adultes tellement différents de ses parents joue, sans qu’elle en ait conscience mais le lecteur, lui, le perçoit, le rôle d’un révélateur.

Un beau texte, où les petites choses quotidiennes peuvent s’habiller d’une densité nouvelle quand on se met à les vivre vraiment et où il est beaucoup question d’amour même si le mot n’est jamais prononcé.

« Les trois lumières », Claire KEEGAN
Editions Sabine Wespieser (100 p)
Paru en avril 2011

Leiloona et Clara l’ont lu et aimé (et m’ont donné envie de le découvrir : une chance pour moi, il avait aussi été repéré par une de mes bibliothèques !).

23 commentaires sur “« Les trois lumières », Claire KEEGAN

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  1. Vous êtes dures les filles à nous parler tous les jours de ce livre. Je vais vérifier s’il est à la bibliothèque, à chaque billet l’envie grimpe d’un cran.

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  2. Comme les copines, je vais le trouver à la bibliothèque, quand je m’autoriserai à y retourner (pour cause de PAL grossissante !)…
    HS J’ai vu que tu voulais lire Le livre de Dina, j’en sors, et c’est un choc, de la meilleure espèce !

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    1. « Le livre de Dina », je l’ai abandonné au bout d’une soixantaine de pages : pas de reproche objectif, juste que je n’avais pas envie d’une lecture aussi profondément « romanesque » ces temps-ci. Une autre fois, peut-être…

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  3. A force de lire vos billets, je me serais presque laissée tenter à l’acheter mais… damned, le prix est un peu cher pour un texte aussi court ! 14€… °_°

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  4. Bonjour Brize, très joli roman emprunté aussi en bibliothèque (je n’ai pas fait de billet). C’est léger, tendre et grave. On devine avant qu’on le sache le genre de drame qu’a vécu le couple. Je conseille aussi et cela se lit très vite. Bonne après-midi.

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  5. La pudeur des sentiments aussi. Ce récit effleure, suggère, à distance des êtres et pourtant si près. Une heureuse découverte pour moi aussi.

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