« La vie très privée de Mr Sim », Jonathan COE

Rien ne va plus pour Maxwell Sim. A quarante-huit ans, il émerge difficilement de la dépression où l’a plongé six mois plus tôt le départ de sa femme, Caroline, accompagnée de leur fille. En congé maladie, il a provisoirement quitté son emploi de chef du service après-vente d’un grand magasin. Et là, il est en Australie, effectuant un voyage prévu de longue date et offert par Caroline, afin qu’il se rapproche enfin de son père, toujours distant avant même qu’il s’exile au loin.
Mais le rapprochement n’est pas manifeste. Rien à voir avec cette scène observée par Max dans un restaurant : une jeune femme chinoise et sa fille jouant aux cartes en partageant une intimité et un bonheur qui l’impressionnent.
Dès lors, c’est cette image qu’il a en tête et c’est à son aune qu’il mesure la qualité de ses relations avec autrui.
Dans l’aéroport, alors qu’il s’apprête à prendre l’avion pour rentrer en Angleterre, il fait la connaissance de Poppy, qui exerce un métier pour le moins étonnant. C’est la première d’une série de rencontres (de gens nouveaux et d’anciennes connaissances perdues ou non de vue) qui vont, de fil en aiguille, l’amener à entamer un voyage original, en même temps qu’il poursuit un parcours plus personnel, cherchant à se (re)trouver lui-même…

Si Mr Sim est déprimé, je peux vous assurer qu’il n’est pas déprimant ! L’auteur a pris le parti de lui laisser la parole et Max s’adresse donc directement au lecteur auquel il conte son histoire dans son style à lui (enfin, il vous dirait son absence de style), spontané, primesautier, ce qui donne énormément de tonus au récit.
Les rencontres se succèdent (mention particulière pour la dernière, surprenante et réjouissante !), jalonnant le récit comme ces quelques textes extérieurs qui viennent s’y insérer (une lettre, une nouvelle et deux récits-confessions) et tissent avec le destin du narrateur des liens intimes en jetant des ponts vers les chemins de révélations à venir. On ne s’ennuie pas une seconde à suivre les déambulations d’un Mr Sim empêtré dans une solitude dont il a terriblement conscience, qui fait écho à celle de son père et le renvoie en permanence à cet environnement du XXIème siècle où les échanges, tant commerciaux qu’entre les personnes, semblent pourtant le maître mot.
Par le biais d’un roman vif, où l’humour et la volonté d’avancer déjouent les pièges de l’amertume, Jonathan Coe se livre à une réflexion frontale sur nos modes de communication en particulier et notre modernité en général, sans oublier de s’intéresser à celui qui est au cœur de ses préoccupations, l’humain.
Distrayant et plein de sens, parfaitement (et habilement) construit : une réussite !

tartefraise-2017-03« La vie très privée de Mr Sim », Jonathan COE
Editions Gallimard (449 p)
Paru en janvier 2011


Réédition d’un article paru initialement en mars 2011 sur mon premier blog (c’était le dernier article du blog en question).

4 commentaires sur “« La vie très privée de Mr Sim », Jonathan COE

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  1. J’aime beaucoup l’introduction de ton billet !
    Plus je lis Coe, et plus je l’aime ! Bon, je n’ai pas encore lu celui-là, qui a l’air très bien, mais ce sera pour plus tard : je compte lire « Numéro 11 » pour le mois anglais.

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    1. Ah mais WordPress ne cessera pas de m’étonner ! J’ai publié ce billet en l’anti-datant (2011, quand j’avais ouvert ce blog et repris quelques billets de l’ancien, mais celui-ci était resté en brouillon) et j’ignorais que les abonnés le verraient malgré tout !
      C’est effectivement en pensant au mois anglais que j’ai remis ce billet en ligne, car j’ai un excellent souvenir du roman 🙂 … qui nuancera mon avis (à venir en juin) sur « Testament à l’anglaise » : je viens de l’achever et il m’a déçue !

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  2. Ton avis m’a donné envie de découvrir la plume de cet auteur. Je savais que j’en avais 2 ou 3 dans ma bibliothèque « anglaise » (en fait j’en avais 4) mais j’ai eu la bonne surprise de voir qu’en fait j’avais celui-ci ! Allez hop, ajouté à ma pile à lire pour le mois anglais. Merci !

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